Ne transigeons pas avec le droit de l’étranger
Un éditorialiste du quotidien La Croix soulignait - il y a quelques
jours - que Nicolas Sarkozy craignait plus l’opposition des chrétiens
à son projet de loi que celle des socialistes. Les chrétiens
en effet craignent que les dispositions de ce texte discuté à
l’Assemblée Nationale depuis le 2 mai ne remettent en cause
les droits fondamentaux de la personne humaine - droits que la
France a pourtant reconnus dans des engagements internationaux - et
qui sont, pour les chrétiens, directement inspirés de
l’Evangile.
Nous vous présentons ci-dessous :
.1) un commentaire de ce projet de loi (« Ne transigeons pas avec
le droit de l’étranger », p.1-7) Il souligne les
dispositions qui nous semblent viser les personnes les plus faibles
et il donne des exemples précis de ce qui arriverait si elles
étaient adoptées.
.2) la lettre que nous vous proposons d’envoyer à votre
député* (p. 8) Même s’il est soumis à
la position de son parti, il n’est pas inutile de lui faire savoir
que des citoyens veillent…
L’équipe pastorale
Deux années après la dernière loi sur l’immigration,
le gouvernement veut réformer le Code de l’Entrée
et du Séjour des Etrangers et des Demandeurs d’Asile (CESEDA)
« pour lutter contre l’immigration subie, promouvoir
une immigration choisie et une intégration réussie
». L’immigration est ainsi officiellement reconnue pour
sa contribution à notre société et des mesures
devraient favoriser l’insertion, ce qui nécessite des efforts
de part et d’autre. Nous sommes bien conscients qu’un tel
sujet est complexe et que la responsabilité des législateurs
est très lourde pour décider dans l’intérêt
général. Nous tenons donc à dire nos alertes.
En privilégiant une immigration « choisie » vis-à-vis
d’une immigration dite « subie » contre laquelle il
faudrait lutter, se profile un recul des droits liés au respect
de la vie familiale et à l’accueil des demandeurs d’asile.
Ce projet veut d’un côté attirer les étrangers
talentueux et compétents, ou utiles pour combler certains besoins
de main d’oeuvre, mais de l’autre augmenter les obstacles
pour ceux qui doivent bénéficier des conventions signées
par la France sur les droits fondamentaux. Le durcissement des procédures
et les allongements multiples de délai vont mettre en danger
la solidité des couples avec des incidences notables sur leurs
enfants. Le projet accule à la désespérance les
milliers d’étrangers présents depuis longtemps en
France, « sans-papiers », à l’heure où
il entrouvrirait le marché du travail.
Cette réforme s’inscrit délibérément
dans une perspective utilitariste. Seront acceptables en France les
étrangers perçus comme nécessaires pour l’économie,
la personne humaine et sa situation personnelle devenant secondaires
et ses droits restreints. Il est de notre devoir de chrétiens
de rappeler que l’homme doit toujours être au coeur de nos
choix et la loi toujours viser à protéger les plus faibles.
Les premiers à « subir » la migration sont ceux et
celles qui sont poussés sur les routes de l’exil, contraints
par la pauvreté et la mauvaise gouvernance. Le bien commun, qui
ne se limite pas à nos frontières, exige de marquer une
priorité réelle et proclamée pour le développement,
notamment pour que nul ne soit obligé d’émigrer
contre sa volonté. L’aide au développement dans
le monde et l’accueil de l’étranger sont devenus
des responsabilités majeures qui supposent une solidarité
accrue et une remise en cause de nos modes de vie. En tant que citoyens
et chrétiens nous ne pouvons pas accepter la vision d’une
société centrée sur elle-même, ni donc cette
vision de l’homme qui va à l’encontre de notre tradition
et de nos convictions pour le Bien commun.
Motivés par la solidarité et la défense des plus
faibles, en partenariat avec de nombreux membres de la société
civile, nos organismes, mouvements, associations et services chrétiens
refusent que des mesures de plus en plus restrictives propulsent des
milliers d’hommes et de femmes dans la précarité
et le désespoir.
Aussi estimons-nous nécessaire d’éveiller les consciences,
d’appeler à la vigilance, à l’information
sur ce projet de loi qui compte des dispositions inquiétantes.
Nous nous engageons à agir pour que
notre société
porte un autre regard sur l’immigration.
INITIATIVE DES CHRETIENS POUR L’INFORMATION SUR LE PROJET DE
LOI « IMMIGRATION ET INTEGRATION ».
Initiateurs :
• Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement
• Cimade - Service OEcuménique d’Entraide
• Secours Catholique - Caritas France
• Service National de la Pastorale des Migrants.
Signataires nationaux :
• ACAT-France
• Action Catholique des Enfants
• Action Catholique Ouvrière
• Action Catholique Générale Féminine
• Action Catholique des Milieux Sanitaires et Sociaux
• Association des Cités du Secours Catholique •Association
Espoir
• Association Française des Pharmaciens Catholiques
• Association « Les Champs de Booz »
• CASP
• Centre de Recherche et d’Action Sociales (Ceras -Projet)
• Carrefour de l’Eglise en Rural
• Commission Provinciale Justice et Paix des OMI
• Communauté Mission de France
• Conseil national de l’Alliance Nationale des UCJG-YMCA
• DEFAP
• Dialogue et coopération
• DOM’Asile
• Eclaireuses et Eclaireurs Unionistes de France
• Equipes Enseignantes
• Equipe Nationale des Prêtres-Ouvriers
• Fédération de l’Entraide Protestante
• Fils de la Charité
• Franciscain International
• Jeunesse Indépendante Chrétienne
• Jeunesse Ouvrière Chrétienne
• Justice et Paix-France
• Mission de la mer
• Mission Populaire Evangélique de France
• Mouvement Chrétien des PTT
• Mouvement du Nid
• OEuvres et Institutions des Diaconesses
• Pax Christi
• Petites Soeurs de l’Assomption
• Réseau Chrétien Immigrés
• Réseau Foi-Justice Europe - Afrique
• Secrétariat National de la Mission Ouvrière
• Service National des Gitans et Gens du voyage
• Soeurs de Notre Dame
• Société des Missionnaires d’Afrique
• Union Nationale des CPCV
• Vivre ensemble l’Evangile Aujourd’hui
Nos organisations invitent chacun à lire l’argumentaire
qu’elles ont élaboré et qui met en évidence
certains aspects du projet de loi, révélateurs de ses
dangers.
Utilisons-le pour informer, débattre, interpeller les élus
qui sont nos représentants...
S/c Service National de la Pastorale des Migrants
269 bis, rue du Fg Sainte Antoine - 75011 PARIS
Tél. : 01 43 72 47 21 - fax : 01 46 59 04 89
snpm @eglisemigrations.org - www.eglisemigrations.org
6 mai 2006 - 14h30 à 17h - Institut
catholique de Paris - rue d’Assas 75006 Paris
QUELLE POLITIQUE POUR L'IMMIGRATION ?
Forum organisé par le Réseau Chrétiens-Immigrés
et la Faculté de Sciences Sociales et Economiques (FASSE)
Salle des Actes - Informations : reseau-chretien-immigres @noos.fr
COMMENTAIRE DU SERVICE NATIONAL DE LA PASTORALE
DES MIGRANTS
PRINCIPALES MODIFICATIONS PREVUES PAR LE PROJET DE LOI SUR
L'IMMIGRATION
De graves atteintes au respect de la vie privée et familiale
Le conjoint étranger d'un Français
L’obligation de présenter un visa de long séjour
pour accéder au séjour.
Cette condition revient à obliger le conjoint de Français
dépourvu d’autorisation de séjour à repartir
chercher un visa de long séjour. Ceci implique une séparation
du couple (alors même que la délivrance du titre est conditionnée
à la communauté de vie !) pendant une durée impossible
à déterminer étant donné les difficultés
à obtenir un tel visa, des frais importants autant qu'inutiles,
un retour impossible pour ceux qui encourent des risques dans leur pays
d’origine… Toutes ces raisons amènent à penser
que de nombreux conjoints de Français préféreront
rester en France sans titre de séjour ; inexpulsables après
plusieurs années de vie commune, ils viendront grossir les rangs
des sans-papiers.
Laurent, un ami de longue
date, vous choisit pour être témoin à son mariage.
Il épouse Juliette, une jeune femme libérienne. Elle a
fui son pays dès qu'elle a obtenu un visa de tourisme pour la
France et est arrivée en 2001. Elle a de suite formulé
une demande d'asile qui n'a malheureusement pas abouti car elle fut
mal conseillée. Sa rencontre avec Laurent a représenté
une grande stabilité dans sa vie. Mais vous êtes choqué
car Juliette ne peut pas vivre en France en tant qu'épouse d’un
Français sans retourner dans son pays d’origine solliciter
la délivrance d'un visa long séjour.
Or, elle a dû vivre des choses douloureuses dans son pays et Laurent
lui-même confie qu'il ne la laissera jamais y repartir. Par discrétion,
vous ne posez pas de questions, mais vous comprenez que Laurent et Juliette
vont vivre des moments difficiles...
La suppression de la délivrance de la carte de résident
de plein droit
Jusqu'alors, le conjoint de Français obtenait « de plein
droit » une carte de résident de dix ans au bout de deux
ans de mariage. La suppression de cette mesure maintiendra plus longtemps
les conjoints de français dans un statut précaire. Si
l’objectif est de lutter contre les mariages de complaisance,
cette disposition n’est pas utile dans la mesure où une
autre disposition prévoit la possibilité de retrait du
titre de séjour en cas de rupture de la vie commune dans les
quatre ans après le mariage.
La suppression de la régularisation après 10
ans de présence habituelle en France
Cette disposition qui accordait le séjour après 10 ans
en France, plus ou moins « en règle », n’était
pas une "prime à la clandestinité" mais bien
la reconnaissance des attaches personnelles nouées par un étranger
ayant vécu de longues années dans notre pays, et donc
vivant une intégration de fait. Sa disparition va enfoncer dans
la précarité et la clandestinité des étrangers
qui vivent depuis longtemps en France. Loin de limiter le nombre de
sans-papiers, elle risque de créer, au contraire, des hors-la-loi
à perpétuité.
Aïssatou est votre voisine
malienne. Vous discutez souvent avec elle sur le trottoir, près
de la boulangerie. Se sentant en confiance, l'autre jour, elle vous
confie avoir quitté son village parce qu'elle était promise
à un mariage forcé. Elle est arrivée en France
en 1997 et elle n'a pas revu sa famille depuis. Ici, c'est difficile
de vivre sans papier. L'an prochain, elle espérait pouvoir demander
un titre de séjour et vivre enfin « en règle ».
Elle est bouleversée car elle vient d'apprendre que, malgré
ce long temps en France, elle ne pourra plus espérer être
régularisée. Elle est acculée à vivre sans
papiers pour toujours.
L'admission au séjour au titre des liens personnels
et familiaux en France
La carte de séjour temporaire « vie privée et familiale
» rend la loi française compatible avec les obligations
issues la Convention européenne des droits de l'homme (art. 8).
Le projet de loi cumule les conditions qui rendront très difficile
l'accès à cette carte pour ceux dont les liens personnels
ou familiaux sont établis dans notre pays. Il exige d’un
sans-papiers qu’il justifie à la fois de conditions d’existence
- donc ressources, logement…- et d’une insertion.
Cela revient à demander à une personne dépourvue
de titre de séjour, et qui vit par définition dans une
situation précaire, de remplir des conditions qui ne peuvent
concerner que des personnes déjà installées légalement
en France. Le fait de ne pas maîtriser le français pourrait
être facteur d’exclusion. Ceci est d'autant plus paradoxal
que, régularisée, la personne pourrait justement contribuer
aux ressources de la famille et bénéficier de l’aide
prévue pour son insertion.
Le regroupement familial
Les conditions du regroupement familial sont durcies. L’étranger
doit déjà répondre de conditions de vie que de
nombreux français n'atteignent pas, notamment en termes de logement
et de ressources, le projet de loi excluant certaines allocations des
ressources prises en compte pour ce regroupement.
Le délai pour le solliciter est allongé à 18 mois
(deux ans selon le discours de présentation du projet).
Le conjoint et les enfants entrés en France par regroupement
familial devront attendre trois ans pour pouvoir solliciter une carte
de longue durée, délivrée de façon discrétionnaire
par la préfecture.
Enfin, le projet allonge la durée de dépendance totale
du conjoint regroupé puisque, si le couple se sépare pendant
trois ans suivant ce regroupement, au lieu de deux, son titre de séjour
pourrait être retiré.
L’allongement des délais, cumulés aux lenteurs constatées
dans la pratique, et l’augmentation des exigences vont fragiliser
le lien conjugal et familial, avec ses incidences sur les enfants.
Vous croisez Aziz, votre voisin.
Il est las, car il n'en finit pas avec les démarches pour faire
venir sa femme et ses deux enfants. La première fois qu'il a
demandé le regroupement familial, on lui a refusé après
une longue procédure parce que le logement avait les toilettes
sur le palier. Il a trouvé à grand peine un autre appartement
compatible, mais qu’il fallait louer immédiatement. Et
d’ici la réponse, il doit payer le loyer d'un logement
bien trop grand pour lui seul. Ah ! il en a encore pour longtemps avant
que la famille ne soit là. Si toutefois, cette fois-ci, ça
marche car il a perçu 2 mois d’allocations de solidarité
voilà un an. Le temps lui semble si long. La dernière
fois qu'il l’a vu au Maroc, son petit dernier ne l'a pas reconnu
!
La reconnaissance d'un enfant français
A Mayotte, reconnaître sa paternité sur un enfant si la
mère est sans-papiers devient suspect pour un Français
: le procureur de la République pourra s’opposer à
l’enregistrement de cette reconnaissance et faire procéder
à une enquête de police. Ce qui était jusqu’à
présent l’affaire du couple deviendrait celle de la justice.
Quoiqu’il en soit, si la maman est sans-papiers, les parents devront
payer les frais de maternité. Pour toutes ces raisons, des enfants
risquent de ne pas être reconnus et de ne jamais avoir de père.
Une précarisation renforcée
La carte de long séjour
C'est la carte, parce qu'elle est valable 10 ans, qui permet une stabilité
du séjour et donc une véritable intégration. Les
conditions pour l'obtenir sont considérablement durcies. On assiste
à une inversion de la logique : il faudra désormais prouver
son intégration avant d’obtenir le statut qui la permet
réellement !
Les parents d’enfants français et les conjoints de Français
devront attendre trois ans, au lieu de deux, pour pouvoir la solliciter.
Plus grave surtout, la plupart de ces cartes de résident seront
délivrées selon le pouvoir discrétionnaire de l’administration.
La notion de délivrance « de plein droit », instaurée
à l’unanimité en 1984, disparaît quasiment.
La règle devient la carte de séjour temporaire, c’est-à-dire
la précarité : comment trouver un logement et un travail
stable avec un titre de séjour d’un an ?
De plus, l'étranger obtient actuellement au bout de dix ans de
séjour « en règle », une carte de longue durée
: cette disposition est purement et simplement supprimée.
Les étrangers, en séjour régulier depuis longtemps,
ne doivent pas demeurer à la merci d’une appréciation
subjective de services administratifs.
Veuf depuis douze ans, Alexandre
avait quitté l’Ukraine pour vivre près de sa fille
unique, installée en France. Comme celle-ci s’était
engagée à compléter sa petite retraite sans qu’il
ait recours à la solidarité française, il avait
obtenu une carte de « visiteur », renouvelée dans
les mêmes conditions. Aujourd’hui, sa fille est en difficulté
financière et ne va plus pouvoir lui apporter la même garantie.
Tant bien que mal, ils pensaient subsister ensemble sans aide extérieure,
d’autant que ses dix ans successifs « en règle »
devaient lui accorder le séjour de longue durée. A bientôt
80 ans, il n’a jamais réussi à s’initier au
français et la nouvelle loi va anéantir ses espoirs :
lui faudra-t-il repartir en Ukraine où il n’a plus guère
de liens ni de toit…
La carte « temporaire » de séjour
Le projet vise à mettre en place « une immigration choisie
» en fonction des besoins de la France. La carte temporaire, généralement
d’une année et qui devient le permis de séjour d’un
nombre croissant d’étrangers, serait « retirée
» si cesse l’une des conditions de délivrance ! Cette
disposition n’est donc pas limitée au renouvellement et
concerne toutes les cartes temporaires en cours de validité,
aussi bien les travailleurs en rupture de contrat et non indemnisés
que les malades en cours de soins si un traitement devient subitement
possible au pays…
Elise est venue du Cameroun
pour un travail dans une entreprise. Elle est notoirement exploitée
: on l'oblige à effectuer des heures supplémentaires sans
la payer. On lui a dit que si elle est mécontente elle peut démissionner
et si elle fait sa mauvaise tête on la licencie : il y a tant
de chômeurs qui cherchent du travail ! Elise pense qu'elle perdrait
alors son droit au séjour et devrait repartir ou vivre «
sans-papiers ». Alors, elle se tait...
L’immigration sera bienvenue pour les cas de pénurie de
main d’oeuvre dans une zone géographique et un métier
définis : une liste ouvrirait ces emplois à des étrangers
que l’on ferait venir. Ces migrants vivront dans la dépendance
du besoin ponctuel de main d’oeuvre ou d’une modification
de cette liste. La crainte sur leur séjour, pour ces étrangers
en proie à une telle incertitude, ouvre la voie à d'amples
dérives ou exploitations.
La création d'une nouvelle carte "Compétences
et talents"
Ainsi est nommé un titre de 3 ans créé pour l'étranger
"susceptible de participer au développement de l'économie
française ou au rayonnement de la France dans le monde"
ou au développement de son pays.
Pour en augmenter l’attrait, cette carte permettrait d’exercer
la profession de son choix et d’échapper à la procédure
du regroupement familial. Ceci est inéquitable par rapport aux
autres catégories d'étrangers qui voient s’éloigner
ces perspectives. Cette vision de l'immigration est donc clairement
le choix d’une sélection élitiste par l'administration,
reléguant la famille et les attaches dans notre pays en fonction
d’objectifs quantitatifs et de « capacités d’accueil
», dans un contexte de repli sur soi et de rejet des moins performants.
Des délais de recours si courts qu’ils annihilent
le principe du « droit à un recours effectif »
Obligation de quitter le territoire
Dans les cas de refus de séjour ou de son renouvellement, ainsi
que d’un retrait de carte, le projet de loi fusionne l'invitation
à quitter le territoire, la décision de reconduite à
la frontière et le pays de renvoi dans une « Obligation
à Quitter le Territoire Français » (OQTF), censée
simplifier la procédure actuelle et désengorger les tribunaux.
Dans cette matière très sensible, le délai prévu
pour un recours contentieux est de 15 jours, voire 72h dans le cas d’une
mise en rétention : ces délais sont beaucoup trop courts
pour pouvoir élaborer un recours efficace.
Le droit d’asile
Pour le droit d'asile, le plus grand danger vient d’un projet
de décret, annoncé mais non publié fin mars, et
qui, parallèlement au projet de loi, réduirait à
15 jours le délai (actuellement d'un mois) pour former le recours
contre une décision négative de l’OFPRA. Quinze
jours pour rédiger en français un recours précis
et circonstancié : autant dire que beaucoup seront de fait privés
d’une voie de recours pourtant actuellement décisive !
D'autant que, si l'étranger n'a pu, sous 15 jours aussi, réceptionner
la lettre recommandée qui contient ce refus, la Poste la retourne
à l'OFPRA : ce courrier est alors réputé avoir
été notifié au jour de la 1ère présentation
par le facteur et un recours devient hors délais.
Faroud est demandeur d’asile.
Iranien, il parle très peu le français et erre d’un
hébergement de fortune à un autre. Son courrier est domicilié
dans une association éloignée où il passe le vendredi.
Le facteur a laissé un avis le lundi ; à la poste locale,
il retire une lettre de l’OFPRA qu’un compatriote lui résume
: sa demande de statut de réfugié est rejetée.
Où trouver une aide pour rédiger son recours en français
? Pas d’argent pour un traducteur ni pour un avocat. Il réussit
à convaincre un autre iranien plus à l’aise en français
: rendez-vous mercredi, tard le soir. Ils se mettent alors à
rédiger. C’est long, difficile. Il doit envoyer le recours
; il écrit trop vite, avec des mots approximatifs. En postant
sa lettre, Faroud sait que ses chances de voir sa situation comprise
par la commission des recours sont déjà très compromises.
* * *
Ces lignes sont loin d’être exhaustives et ne résument
pas l’intégralité du projet de loi dont des versions
antérieures contenaient des dispositions plus dures. Elles veulent
contribuer à informer l’opinion sur son esprit, interpeller
les élus sur les mesures actuelles et montrer la vigilance pour
éviter que des propositions plus restrictives ne tentent, lors
des débats parlementaires, d’affaiblir encore les droits
des étrangers.
UNIS CONTRE UNE IMMIGRATION JETABLE
Manifestation nationale à Paris
Le 13 mai à partir de 14h
Place de la République
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Paris le........................ 2006
M… ou Mme le (la) Député(e),
A partir du 2 mai 2006, un nouveau projet de loi réformant le
droit des étrangers en France va être examiné par
les parlementaires. Le gouvernement a clairement indiqué qu’il
voulait « lutter contre l’immigration subie, promouvoir
une immigration choisie et une intégration réussie ».
Un tel sujet est complexe et la responsabilité des législateurs
est très lourde pour décider de la meilleure voie à
suivre dans l’intérêt général.
Mais le bien commun ne se limite pas à nos frontières.
Il serait illusoire voire dangereux d’avoir la vision d’une
société uniquement centrée sur elle-même.
Aussi j’estime qu’il est de mon devoir de chrétien
de rappeler que l’homme doit toujours être au cœur
de nos choix et la loi toujours viser à protéger les plus
faibles. Il est de mon devoir également de rappeler
que les migrants -surtout les plus modestes - ont toujours
contribué au développement de notre pays.
Ce faisant, je suis en plein accord avec l’appel de 46 associations
et mouvements chrétiens intitulé « Ne transigeons
pas avec le droit de l’étranger ». De plus, le Conseil
des Eglises Chrétiennes de France doit rendre publique une lettre
au Premier ministre allant dans le même sens. Ces initiatives
se rejoignent pour alerter l’opinion sur les dangers que contient
ce projet de loi. Aussi me semble-t-il nécessaire d’appeler
votre attention sur quelques dispositions inquiétantes contenues
dans ce projet de loi :
• Graves atteintes au respect de la vie privée et familiale
: les nouveaux durcissements des conditions d’obtention d’un
titre de séjour pour les conjoints de français et pour
les candidats au regroupement familial vont fragiliser d’autant
le lien conjugal et la vie des enfants.
• Suppression de la possibilité d’une régularisation
après 10 ans de présence habituelle en France. La disparition
de cette disposition va enfoncer dans la précarité et
la clandestinité des étrangers qui vivent depuis longtemps
en France tout en méconnaissant leur intégration de fait.
De surcroît, elle fabriquera des hors-la-loi à perpétuité.
• Conditions durcies pour l’obtention de la carte de long
séjour. Or, valable 10 ans, cette carte est la seule qui permette
une stabilité du séjour et donc une véritable intégration.
• Précarisation renforcée avec la généralisation
de la carte temporaire (le plus souvent d’une année) qui
devient la norme. Mais comment trouver un logement et un travail stables
dans ces conditions ? Et, partant, comment s’intégrer véritablement
? D’autant que cette carte temporaire serait « retirée
» si cesse l’une des conditions de sa délivrance
: travailleurs en rupture de contrat et non indemnisés, malades
en cours de soins si un traitement est estimé subitement possible
au pays, etc.
• Des délais de recours si brefs qu’ils annihilent
la possibilité d’un recours effectif.
Ces mesures toujours plus restrictives auront pour effet de propulser
des milliers d’hommes et de femmes dans la précarité
et le désespoir et de fragiliser d’autant notre société.
Pour éviter que de telles mesures ne soient votées ou
que des propositions plus restrictives encore ne tentent, lors des débats
parlementaires, d’entraver plus profondément la vie des
étrangers dans notre pays, j’en appelle à votre
vigilance et votre responsabilité d’élu.
En vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien accorder
à mon courrier, je vous prie d’agréer, M…
Madame le (la) Député(e), l’expression de mon entière
considération.
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* Vous trouverez l’adresse électronique de votre député
sur le site de l’Assemblée nationale : http://www.assemblee-nationale.fr
A droite de la page d’accueil de ce site, figure la liste des
députés. En cliquant dessus, vous trouverez facilement
la présentation de votre député et son adresse
électronique pour la lui envoyer cette lettre rapidement. Les
discussions démarrent le 2 mai…