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Dimanche 28 avril
2013
5ème Dimanche de Pâques
" Voici que je fais toutes choses nouvelles "
Lectures
• Livre des Actes des Apôtres (Ac 14, 21b-27)
• Apocalypse de saint Jean (Ap 21, 1-5)
• Evangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 13, 31-33a.34-35)
Bonjour et bienvenue à vous tous, amis de passage
ou fidèles de cette communauté de St Merri. Bienvenue, à
nouveau à Daniel Duigou, qui arrive de son désert marocain
pour nous rejoindre à St Merri et qui va présider notre
Eucharistie communautaire pour la seconde fois.
Les textes de ce dimanche nous invitent à un programme réjouissant….
« Voici que je fais toutes choses nouvelles », réjouissant
donc, mais difficile aussi…. Aimez-vous comme je vous ai aimés
!
…. Et cette chose nouvelle c’est « la Jérusalem
nouvelle » décrite dans l’Apocalypse comme la cité
de Dieu avec les hommes. C’est donc l’anti Babel, en ce sens
que cette tour était folie, folie de vouloir toucher le ciel donc
être comme Dieu, à la place de Dieu. Non, cette tour ne peut
pas tenir car les hommes y sont sans Dieu. Hommes nomades, ils ont voulu
un jour s’immobiliser, s’ installer, et dresser des murs autour
d’eux, ils parlent tous la même langue qui les fait répéter
la même chose à l’infini, ils se figent, ils sont comme
« morts ».
Le Christ, qui est allé jusqu’au bout de son amour, par sa
vie, sa mort et sa résurrection, vient nous remet en marche, en
mouvement de façon totalement nouvelle ; il nous rend vivants et
uniques par son Amour donné à chacun, amour qui nous touche,
nous transforme, nous invite et nous rend capables, à notre tour
d’agir, de donner et d’aimer.
Etre pleinement Homme avec Dieu, c’est en effet être en chemin,
se risquer à l’aventure et agir pour essayer de construire,
avec nos frères, ce monde nouveau aujourd’hui,… il
est déjà là mais pas encore tout fait …. C’est
bien le sens de notre partage eucharistique de ce dimanche.
L’Homme est pleinement Homme quand il rencontre Dieu. Ce monde nouveau
des Hommes avec Dieu, nous le célébrons à travers
le chant que nous avons choisi ensemble lundi soir….. Que ta volonté
soit faite, Seigneur des temps nouveaux et que ton royaume vienne au milieu
de nous….
Bernadette Capit-Lavoipierre
« Voici que je fais toutes choses nouvelles »
C’est ça, aimer. Aimer comme Dieu. C’est-à-dire
vivre de l’amour de Dieu.
Nous avons choisi de ne lire aujourd’hui que les 2 textes du même
auteur, Jean. Pour deux raisons.
1. Un de ses thèmes dominants est la fraternité. Pas une
société qui se structure selon un schéma pyramidal,
mais selon un cercle où chaque participant est l’égal
de l’autre. Cet autre, l’étranger, dans lequel il s’agit
de se reconnaître.
2. Pour Jean, le mot amour n’est pas un concept si séduisant
soit-il intellectuellement, mais une praxis. C’est en faisant l’expérience
de l’amour que l’on découvre ce qu’aimer veut
dire et que l’on découvre encore plus notre désir
d’aimer.
Selon Jean, l’amour est à inventer comme il précise
d’ailleurs que la Vérité « est à faire
». Inventer dans sa liberté d’être et de désir.
Inventer dans la responsabilité, les droits et les devoirs d’un
citoyen du monde à venir.
Dans l’extrait de l’Apocalypse, en pointant la problématique
de la Jérusalem céleste, Jean donne un caractère
politique à la perspective de l’homme. On ne peut comprendre
la référence à cette Jérusalem qui reste à
construire que si on l’oppose à la fameuse Tour de Babel.
Encore aujourd’hui, ne sommes-nous pas ces hommes et ces femmes
qui préfèrent la sécurité aux risque de l’aventure,
le confort à l’aléatoire, l’incertitude, inconnu.
Leur « folie », ce n’est pas seulement de « croire
» qu’une tour peut atteindre les nuages et tenir debout, c’est
de « s’installer » (le mot hébreux du texte).
Pour eux, c’est déjà la mort. Vivre, dans la bible,
c’est partir, comme Abraham. Se déplacer. Changer d’horizon.
Remettre en cause ses habitudes. Ne plus être dans la répétition
mais dans la créativité. Oser le nouveau, comme Dieu.
La Jérusalem céleste, c’est la société
qui se construit avec Dieu. Chaque pierre (ou brique, comme dans le texte
de la Tour de Babel) est unique, et le ciment est l’amour. Accepter
la différence de l’autre, c’est se « déplacer
». Il y a bien sûr le déplacement géographique
: on apprend en partant à l’étranger d’où
l’on vient et qui on est … Mais il y a surtout un autre déplacement
à faire : il est invisible et se situe dans notre tête :
changer notre grille de lecture, réécrire notre catéchisme.
L’actualité nous montre que dans les changements de la société
actuelle, de l’économie à la culture en passant par
le social et même le psychologique, il s’agit de penser autrement.
Le texte de l’Evangile est aussi à comprendre dans une perspective
politique : construire une nouvelle cité. Mais Jean insiste sur
le changement de rapport avec l’autre : devenir homme, en fait,
en étant avec l’autre. Ce passage de l’évangile
de Jean vient immédiatement après le Lavement des pieds
qui, chez cet auteur, vient à la place du Dernier repas rapporté
par les autres évangélistes. Pour Jean, être au «
service » de l’autre, dans la perspective d’une Jérusalem
céleste (et donc pas dans une position de soumission), c’est
vivre l’eucharistie, se nourrir de l’amour de Dieu en se nourrissant
de la différence de l’autre. Une véritable révolution.
Une nouvelle morale ? Un véritable « saut » dans la
foi qui ne peut se vivre qu’avec Dieu car, accepter de « sauter
», sans garantie, c’est ça « vivre Dieu »
et donc comprendre qui est Dieu. D’où l’interprétation
de cette phrase dans l’évangile de Jean : « aimez vous
les uns et les autres comme je vous ai aimé ». L’invitation
à s’aimer n’était pas franchement nouvelle à
l’époque. Mais aimez-vous comme je vous ai aimé, voilà
ce qui l’est. Jésus ne dit pas : prenez-moi comme modèle,
mais aimez-vous de l’amour de mon Père, comme je vous ai
aimez, ce qui est radicalement différent ….
Une feuille de route pour l’Eglise qui doit rendre «visible
» cette Jérusalem céleste ? Pour la communauté
de St Merri ?
Se réunir autour de la table n’a de sens que si nous sommes
déjà en route. Le partage eucharistique est déjà
la Jérusalem céleste, déjà et pas encore !
Possible demain ? Oui, Jésus le révèle au cœur
de sa résurrection, il révèle la « toute puissance
» de son amour.
Partir ? Quitter son confort et ses sécurités ? Ca fait
peur, bien évidemment ; mais, ensemble, beaucoup moins.
Se couper de son origine ? Oui, car cette séparation « fait
» origine. Une nouvelle identité d’homme (d’hommes
et de femmes).
Le commencement du monde, notre naissance.
Daniel Duigou
Nous avons pris l’habitude ici, à Saint-Merry, de quitter
le carré du partage de la parole pour aller vers le chœur
pour le partage du pain. Une habitude. Très vite les nouveautés
deviennent des habitudes.
En ce dimanche où nous célébrons le Seigneur des
temps nouveaux, redonnons sens, si vous le voulez bien, à ce déplacement.
Un poète a fait de Jésus « l’homme qui marche
». Acceptons d’être toujours en marche, à la
recherche de ce qui est plus grand que nous. Et le premier venu, dit-il
, est plus grand que nous. Regardons-nous alors dans le mouvement de cette
venue, tous différents, avec confiance.
Heureux d’être invités au repas du Seigneur, chantons,
partageons la parole et le pain, et nous devenons déjà,
comme il nous l’a dit, le corps du Christ. Déjà, et
cependant pas encore.
Et pour cela nous rendrons grâce.
Jean Verrier
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