Prises de paroles

 

Dimanche 1er avril 2012
LES RAMEAUX

"Hosanna !"

Lectures
• Evangile de Jésus Christ selon saint Marc (Mc 11, 1-10)
• Livre d'Isaïe (Is 50, 4-7)
• Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens (Ph 2, 6-11)
• La Passion de Jésus Christ selon saint Marc (Mc 14, 1-15,47)

Accueil

Chers amis, soyez tous les bienvenus à cette célébration, vous qui êtes portés par la foi en l’espérance dans la résurrection de Pâques toute proche, et vous aussi, qui entrez ce matin sous ces voûtes séculaires, poussés peut-être par une force intérieure inconnue dont parfois nous ne savons même pas le nom… Soyez les bienvenus, en ce Dimanche qui s’appelle à la fois le Dimanche des Rameaux et le Dimanche de la Passion, dont le rapprochement par la liturgie peut paraître paradoxal …

Dimanche du scandale, c’est ainsi que le qualifie Benoît XVI - le mot, en Grec, veut dire piège sur le chemin, obstacle pour faire tomber - , dimanche du contraste inouï entre l’arrivée de Jésus à Jérusalem au milieu d’une liesse populaire : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » et le parcours de Jésus, depuis le prétoire où siège Pilate, jusqu’à la croix dressée sur le Golgotha.
Il nous faut comprendre ce qui s’est passé ... Les Juifs, ne l’oublions pas, étaient, pour beaucoup d’entre eux, tout pénétrés des paroles du premier testament, elles leur étaient familières, et les rédacteurs du second testament n’ont pas manqué d’enraciner les événements dont ils étaient témoins dans les réminiscences du texte biblique qui s’imposaient d’elles-mêmes à leur esprit. Les événements du jour prennent alors la couleur des paroles antiques…
Jésus entre dans Jérusalem comme il l’a voulu, on pourrait dire : comme il l’a organisé - monté sur le petit d’une ânesse, ainsi que l’a écrit Zacharie (9, 9) : « N’aie pas peur, fille de Sion, voici ton roi qui vient, monté sur le petit d’une ânesse ! »… Et la foule de crier : « Béni le règne qui vient, celui de notre père David ! »… Ils voient sans doute en Jésus le Roi qui rétablira Israël dans sa puissance… Ils voient aussi en lui le prophète : Qui est cet homme demandent certains, et les foules répondaient : « C’est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée » (Mt 21, 11).

Mais si Jésus est roi, son royaume n’est pas de ce monde…Et c’est pour cela que tout bascule !
Jésus est arrêté, condamné, crucifié… Sur le bois de la croix, s’expriment la totale solidarité de Jésus avec la condition humaine, et l’achèvement de l’annonce de cette Bonne Nouvelle révolutionnaire dont il assume les conséquences extrêmes : une mort infâmante et cruelle. Il ne s’agit pas ici d’une obéissance à un Dieu tout-puissant, mais de la relation mystérieuse entre le Père et le Fils : « qui me voit voit le Père, dit Jésus dans l’évangile de Jean (14, 9).
Ayant rassemblé en lui l’humanité, Jésus remet sa vie entre les mains de son Père. Il est là comme un grand prêtre dont le manteau rouge a symbolisé la fonction, quelques heures plus tôt, lorsque les gardes de Pilate l’ont posé sur ses épaules en croyant le ridiculiser.

Notre foi est ici mise jeu, prise à partie dans une violence terrible ! Car notre foi n’est pas celle d’agneaux bêlants, notre foi est confrontation à la douleur, à la souffrance et à la mort de Jésus. Confrontation dont l’insupportable sera effacé au matin de Pâques, lorsque Marie de Magdala pourra dire au Seigneur ressuscité : « Rabbouni ! ». Dans cette attente de la résurrection, nous pourrions tomber dans un piège faisant obstacle à notre foi, c’est en ce sens que Jésus nous est objet de scandale - nous laisser aller à la révolte, ou bien à une soumission totale, sans voir que Jésus assume une mission, en traçant ce chemin mystérieux qui passe successivement par la route de Jérusalem jonchée de palmes et le sentier montant au Golgotha…

Christian Manuel

Jésus passe en peu de temps de la popularité à la déchéance : il entre dans la ville sous la clameur des habitants, et passe hors de la ville pour une exécution. Ainsi, Jésus nous rappelle que nous vivons constamment à la frontière de l’humiliation, toujours menacés d’être déportés vers un pays cruel.
En effet, Il passe de la reconnaissance comme envoyé de Dieu à la condamnation pour blasphème. Or, l’humiliation contient en son sein l’exclusion du droit de vie, chez l’autre.

Baptisés, nous sommes devenus prophètes. A ce titre, nous nous engageons à respecter l’autre dans toute son humanité. Je crois qu’en tant que Chrétien nous avons un rôle dans la société, aujourd’hui, un rôle d’engagement. Pour cela, comme le peuple d’Israël, acceptons de nous laisser nourrir chaque matin par sa Parole. Car écouter la Parole c’est « se laisser instruire » par elle. C’est aussi vivre dans la confiance. De tout mal, de toute difficulté, de toute épreuve, Il fait surgir le bien.
De toute haine, Il oppose un amour plus fort encore ; dans toute persécution, Il donne la force du pardon ; de toute mort ; Il fait surgir la vie, la Résurrection.
Baptisés, grâce à cet engagement, acceptons de nous laisser convertir.
Accepter l’autre dans toute son humanité, c’est aussi accepter que d’autres puissent rejeter cet appel. Mais que ce rejet ne soit pas le signe d’une persécution.

« J’ai rendu mon visage dur comme pierre » : elle exprime la résolution et le courage. Car s’engager, c’est aussi marquer sa différence, sa position, sa foi dans un monde qui se désengage par peur d’être exposé aux regards des autres. Avoir le courage de se démarquer, c’est avoir le courage de ses choix, de sa foi dans un monde anticlérical.
Les personnes, rebutées par le christianisme, ne le sont pas pour des questions théologiques, mais pour des raisons morales car elles redoutent le changement de vie que le christianisme impliquerait.
Vivre aux coté de Jésus c’est être en questionnement perpétuel, c’est être attentif à nos actes et à nos paroles car nous pouvons avoir la certitude d’être accompagné, d’être porteur d’une lumière.

Aurélie Vuibert

Préface

Si pour l’Eglise se tourner vers le monde signifiait se détourner de la Croix, cela conduirait non pas à un renouveau mais à un abandon.

Père,
La foi que nous donne ton fils est un scandale pour l’homme de tous les temps :
Que toi, Père, tu te soucies de nous les hommes, qui que nous soyons,
et que tu nous connaisses et nous aimes tels que nous sommes,
Que ton Fils Dieu insaisissable comme toi, se soit fait saisissable dans l’homme Jésus,
Que celui qui est immortel ait souffert sur la croix,
Que la résurrection et la vie éternelle nous soient promises à nous mortels,
Et que tout cela soit gratuit, absolument gratuit,
Oui le scandale est grand !

Mais ce qui dépasse encore cela,
c’est qu’à notre tour nous devenons scandale pour tous les hommes,
en empruntant sur cette terre le chemin ouvert par ton fils,

Que nous prenions à sa suite les armes de l’humilité, de la pauvreté, du don de soi,
Que nous prononcions les Paroles qu’il a dites pour qu’elles demeurent des paroles de vie,
Que nous accomplissions les gestes qu’il a fait en nous demandant de les faire à notre tour,
pour le bonheur de tous les hommes,
et pour la Gloire de Dieu

C’est par lui que la terre et le ciel, tout le peuple de Dieu ne cessent de t’acclamer en chantant…

Jacques Merienne