Prises de paroles

 


Dimanche 15 août 2010
Assomption

Commentaire de l’Evangile de Luc, 1, 39-56.

A vrai dire, si nous cherchons dans les Evangiles des images quotidiennes, des récits de la vie de Marie, nous restons un peu sur notre faim.
La fête du 15 août célèbre le dogme de l’Assomption de Marie, qui est récent (le 1er novembre 1950). Et pour évoquer Marie, c’est de l’évangile de Luc qu’est tiré un texte: chaque année, pour la fête de l’Assomption, la liturgie nous propose, entre le récit de l’Annonciation et la scène de la nativité à Bethléem, le texte dit de « la Visitation » que nous venons d’entendre.
Ce beau texte est centré sur la rencontre de deux femmes, Marie et Elisabeth, deux cousines qui toutes deux attendent un enfant. Mais là encore, peu de détails : le texte est discret, presque secret. Après les salutations, le récit se détourne pour s’ouvrir et se déployer sur le «Magnificat », ce cantique qui vient de loin…
Comment entendre ce qui se joue dans cet étrange récit ?

• Dans une lecture à « raz du texte » apparaît d’abord une figure de femme.
Le récit campe Marie comme une femme dynamique « elle se met en route rapidement »,
une femme qui décide et qui part, seule, sans compagnon.
Elle est forte, sans doute résistante car elle va « vers une ville de la montagne de Judée », à pied, comme cela se fait en ces temps-là.
Et de même qu’elle a décidé de partir, elle reste « environ trois mois » et elle décide de « s’en retourner chez elle » : elle est à peu près dans sons 6ème mois de grossesse !

• A un autre niveau de lecture, déjà plus symbolique, certaines et certains d’entre nous se réjouissent de voir émerger de ce texte, grâce à Marie, comme « une part féminine de Dieu » : certes il y a l’image maternelle évidente - mais cette dimension de Dieu est plus présente dans l’Ancien Testament- ! Marie, comme part humaine ET féminine de Dieu, c’est autre chose : c’est une fraîcheur, une liberté et cette joie émerveillée qui l’habite et qui déborde (et qui apparaît en Elisabeth aussi, comme en miroir !). Cette joie s’entend dans les mots de louange et d’action de grâces du Magnificat.
Oui, n’est-ce pas, il est possible d’imaginer, de prier, de célébrer comme une image de Dieu au féminin…

• Enfin dans ce texte, Marie est une figure de l’Eglise : le Magnificat qui s’élève du cœur de Marie en est déjà un signe. Ce chant vient de loin, il est inspiré de cantiques de l’Ancien Testament et pour Marie, il dit le lien profond entre son espérance, la foi d'Israël, et déjà, sa foi à l’enfant Jésus qu’elle porte. Et il dit aujourd’hui l’action de grâce de l’Eglise.

Autre signe : portant en elle l’enfant, le Messie annoncé, Marie est habitée d’une Bonne Nouvelle, qui est la vie en elle, mais la Vie de Dieu ! Elle va à la rencontre d’Elisabeth -qui est enceinte également- elle ne sait pas bien que dire… Et c’est Elisabeth, l’autre, qui lui dit d’une voix forte : « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur ! ».
« Heureuse celle qui a cru ! » : Elisabeth, « remplie de l’Esprit Saint », proclame cette bénédiction, comme une reconnaissance et une nomination de Marie : Marie est « celle qui a cru »…
Et l’Eglise, celle qui croit, qui porte la Bonne nouvelle, qui a mission de la partager, qui a charge de la transmission.
Aujourd’hui, cette béatitude nous est adressée, à nous, car nous sommes l'Église : alors, deux pistes pour notre méditation:

- croire comme Marie a cru ? Seuls, par nous-mêmes, le pouvons-nous ? Accepter de nous laisser emplir de l’Esprit ? Et de nous rassembler ?
- croire dans la rencontre ? Et comme Marie, aller vers l’autre porteur de quelque chose qui peut nous rejoindre, nous faire signe, avoir besoin de l’autre pour faire église…

En ce 15 août, Marie est une figure de l’Eglise joyeuse, ouverte mais exigeante, et qui nous donne l’espérance.

Céline Dumont

Préface

Père,

La visite de Marie à sa cousine Elisabeth
annonçait que ton Fils commençait sa visite dans notre monde,
commençait le long voyage parmi les hommes
dans lequel il nous a emmenés.

Voyager ce n’est pas d’abord traverser le monde
c’est ouvrir sa vie, ouvrir son esprit, ouvrir son âme.
Voyager à la manière de ton Fils est un choix de vie
autant qu’un déplacement.

Il s’agit de s’approcher de l’autre, de faire sa connaissance,
d’accueillir en soi de nouvelles questions
de nouveaux espoirs
d’accueillir d’autres visages, d’autres manières de vivre.
d’accueillir en soi d’autre bonheurs, d’autres joies.

Mais aussi d’accueillir d’autres attentes, d’autres besoins,
d’autres détresses, d’autres désillusions
Mais aussi d’autres révoltes, d’autres luttes,
d’autres projets, d’autres risques, d’autres courages.

Voyager c’est aussi tressaillir comme Jean,
devant une lumière nouvelle
devant un visage nouveau
devant une présence nouvelle
Tressaillir du bonheur que nous partage le Seigneur des vivants,
ton Fils,
lui qui a visité notre monde
lui qui a habité et vaincu la mort,

Achevant auprès de Toi le long voyage parmi les hommes
dans lequel il nous a emmenés,
et que nous poursuivons en son Nom avec son Esprit.

Jacques Merienne




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