Prises de paroles

 

30 août

A propos de Marc 7

Nous choisissons de lire le chapitre 7 de Marc de 1 à 30 pour une meilleure compréhension, ce que ne permet pas les « morceaux choisis » du missel.

L’épisode se situe entre deux multiplication des pains. La première destinée aux juifs (on y ramasse 12 corbeilles, symbole du peuple de Dieu), la seconde pour les païens (on y ramasse 7 corbeilles, symbole de l’ensemble des « nations »).
Après la première Jésus traverse la mer avec ses disciples mais on le poursuit.  Une polémique se déclenche avec les pharisiens qui lui reprochent de ne pas respecter les préceptes de pureté rituel (se laver les mains avant de manger le pain). « La vraie pureté est dans le cœur », répond Jésus. Suit l’épisode d’une femme grecque (païenne) qui vient demander la guérison de sa fille. Impossible de donner au païens le pain prévu pour les juifs, argumente Jésus (il n’est pas question là de partage mais de pureté, le pain touché par la païenne ne serait plus kasher, un juif ne pourrait plus le manger). La réponse de la femme est célèbre : il reste les miettes qui tombent de la table pour petits chiens.
Cela va ouvrir pour Jésus le chemin vers la décision d’une deuxième multiplication des pains, cette fois en terre païenne.

La pureté rituelle n’est pas destinée à éviter une contamination (comme aujourd’hui la grippe). Elle définit l’appartenance à un peuple, elle définit une identité collective.
L'exorcisme de la fille de la Syrophénicienne survient à un moment critique dans l'évangile. Jésus va-t-il franchir le pas de « sortir » d’Israël ?
La distinction du sacré et du profane, du pur et de l'impur est importante pour l'ordre social, pour que chacun et chaque chose restent à leur place.
À Tyr, Jésus franchit des barrières à un triple point de vue :
— social (une femme),
— géographique (une étrangère), 
— religieux (une païenne).

Le franchissement de la limite est rendu possible par la femme elle-même, qui du coup redéfinit partiellement les valeurs poursuivies dans l'action de Jésus et libère sa puissance sanctificatrice pour les païens. Il va prendre la décision de passer outre et multiplier les pains pour une foule de païens.
Cela fait deux multiplications qu’il va devoir unifier : il le fera la veille de sa passion, dans son dernier repas, la cène.

Pur/impur ; sacré/profane, des frontières que chaque génération renouvelle.
Racisme, exclusion de l’étranger, repli sur soi, sur sa foi et sa religion, sur ses coutumes (la France on l’aime ou on la quitte) ; sur ses orientations sexuelles ;  tout cela basé sur la peur…

Question aujourd’hui très présente, (publicité pour la nourriture Halal à la télévision) très politique. ( ne pas sauter les verset disant : « il déclarait pure toute nourriture »). D’un autre côté la  peur de la maladie : la mise à l’écart des séropositifs dans la vie sociale et professionnelle, véritable rétablissement de la discrimination par le « pureté ».
Ce dernier point marque d’ailleurs un « progrès » dans la peur de l’autre : elle s’individualise, il ne s’agit plus de l’appartenance à un peuple, ou à une communauté, mais de moi, de moi tout seul qui ne supporte pas qu’on soi différent de moi et qu’on mettent en cause l’image que je me fait de moi-même.

Ses questions sont au cœur de ce qui nous rassemble ici au CPHB :
comment se marque le respect quand il n’est pas basé sur la séparation,
mais sur l’accueil, la rencontre, le partage ?

Préface pour le 22º dimanche

Père

Que font de nous nos peurs ?
Que font de nous les souffrances dont nous avons peur ?

Bien sûr les souffrances éprouvées par la mort et par l'amour sont
la plupart du temps dignes et même nobles.

Mais il y a aussi ces sentiments qui nous font honte
et qui nous détruisent
comme le ressentiment et la jalousie.
Le refus de l’autre quel qu’il soit.
Ces sentiments sont tapis en nous,
et nous savons d'où ils viennent : de la peur.

Il y a en revanche tant de bonheur à accueillir la révélation de notre communion avec tous les hommes en ton fils !
Il a transformé nos peurs par les épreuves de sa mort et de son amour.

Peut-être la mort et l’amour n'est-ce qu’une seule même épreuve?
C'est l'épreuve de la distance,
qui crée en même temps la solitude et l’espérance.
la distance qui nous vient des êtres que nous aimons
la distance qui nous vient de l'amour
puisqu'on ne souffre vraiment que de la part des êtres qu'on aime.

Sans doute est-il nécessaire d'éprouver cela,
pour connaître celui que nous sommes
révélé par la solitude,
relevé par l’espérance
devenu ainsi merveilleusement disponible à la solitude et à l’appel de tous les autres, si proches ou si différents soient-ils

Alors avec ton fils nous nous tenons sur la frontière, sur le seuil
n’ayant plus peur ni de l’autre, ni de la solitude
Nous nous tenons, entre le chemin déjà accompli et l'espace inconnu qui nous appelle.

C’est pourquoi nous voulons unir nos voix à celle qui te chantent unanimes dans les cieux …

Jacques Mérienne

 

 

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