Prises de paroles

 

27 MAI - Pentecôte

Chacun s'exprimait...
chacun comprenait...

Évangile selon saint Jean - Chapitre 14 versets 15 à 26

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : c’est l’Esprit de vérité. Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. Celui qui ne m’aime pas ne restera pas fidèle à mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé. Je vous dis tout cela pendant que je demeure encore avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit »

Aujourd’hui, jour de Pentecôte, c’est la fin du prélude : un prélude qui commence comme l’Evangile de Jean : ‘au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu’. Chacun connaît la suite : ‘le Verbe s’est fait chair, il est venu parmi nous’. Un prélude qui se termine donc ce jour de Pentecôte, mais cette fois, c’est l’inverse, c’est la chair, celle des disciples, qui se fait Verbe, et dans toutes les langues, comme nous l’entendrons tout à l’heure dans les Actes des Apôtres.

Fin du prélude donc, et depuis ce jour c’est à nous d’interpréter cette Parole, c’est à nous de la restituer dans un langage qui parle aux hommes (à l’image des disciples qui parlaient toutes les langues) et c’est à nous d’écrire la fin de l’histoire. A nous, individuellement et collectivement dans cette communauté du CPHB !

Mon Père vous enverra un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : c’est l’Esprit de Vérité. Comment accueillir ce Tout Autre, cet Etranger à nous mêmes ? Entre les moments où la vie est sans problème et où nous n’en ressentons aucun besoin, et les moments où nous sommes submergés par les problèmes et trouvons notre dieu bien timide, comment rester fidèle, comment ouvrir notre cœur, comment nous convertir pour que l’Esprit ait sa place et écrive avec nous la suite de l’histoire ?

Je vous propose 2 courts extraits de Maurice Zundel sur le comment maintenir allumée la petite langue de feu que Dieu dépose en nous aujourd’hui :

Il faut sauver Dieu de nous mêmes, comme il faut sauver la musique de notre bruit, comme il faut sauver la vérité de nos fantasmes, comme il faut sauver l’amour de notre possession.

[orgue]

La prière est l’exaucement de Dieu par l’homme. […] Exaucer Dieu, c’est nous ouvrir à ce don qu’Il est en permanence afin que par notre prière Il puisse se répandre sur tout notre être et, par nous, dans tout l’univers.

[orgue]

Michel Bouvard

Commentaire après la lecture du livre des Actes des Apôtres (Ac. 2, 1-11)


L’Esprit du Christ, la vie et l’amour de Dieu qui prennent naissance au cœur de notre être ne peuvent que donner origine à une expression forte :
« Il furent tous remplis de l’Esprit Saint, ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit »
Mais, stupéfaction ! « chacun les entendait parler sa propre langue »…
Le contraire de Babel…où l’homme (le plus fort) imposait une langue et une pensée unique pour se faire l’égal de Dieu…
Quand l’Esprit fait parler l’homme, il est entendu par chacun, tel qu’il est, là où il en est. Et il est appelé à devenir, à devenir « chacun selon son espèce », ce qu’il porte en lui de merveille d’humanité, en incarnant avec d’autres toutes les mosaïques humaines de différences et de particularités…
Et là, naît l’Eglise, avec son langage à plusieurs voix, sa symphonie de prière et d’action, d’hommes et de femmes à part entière. Vivre ensemble devient possible, car l’autre existe.
A la Pentecôte l’Esprit crée l’Eglise, car se réalise ce grand corps du Christ qui est chacun de nous et nous tous ensemble, dans l’expression vive des diversités.
L’Eglise est cette famille qui se vit différente et se retrouve œcuménique et une en Christ ; l’Eglise vit de théologies différentes qui parfois s’opposent ; notre communauté est Eglise dans ses « courants » et « sensibilités » parfois si vivement contrastés…
L’Eglise est aussi dans ce que nous ne connaissons pas du Christ : dans le mystère de chacun des hommes d’autres religions, des non croyants, des indifférents et aussi, …et peut-être surtout de ceux qui s’expriment comme franchement athées !

Evelyne Holzapfel

MEDITATION A LA MANIERE D’UNE PRIERE EUCHARISTIQUE

Ce n’est pas par habitude, par routine ou réflexe que nous voulons te rendre grâce, Dieu notre Père. Nous voulons te remercier, bien que certains jours il nous coûte plus que d’autres, parce que dans notre louange il y va de notre vie, parce qu’en te rendant grâce nous ouvrons notre horizon et la vraie vie que tu nous offres, irrigue nos veines.
Et si ton Esprit planait déjà sur la surface des eaux indifférenciées, ce qui en sortit au moment de la création ce ne fut pas un monde uniforme, univoque, monocorde et homogène. Ce fut la profusion de la différence. Pour cette profusion originelle, pour les couleurs innombrables, pour les parfums aux nuances infinies, pour la prolifération des formes à faire tourner la tête du rationaliste le plus obtus nous te remercions.
Mais ce n’est pas seulement dans le monde la nature que, par ton Esprit, tu t’es déchaîné. C’est également dans l’homme, dans l’humanité. Couleurs et caractères, cultures et expressions, points de vue et tendances. On a du mal à suivre. Impossible de tout savoir et contrôler. Et c’est tant mieux. Car notre obsession, tu le sais bien, c’est « une tour, une ville, une langue, les mêmes mots » : la mort. Tu forces l’homme à la différence et à la variété sans fin; aux langages multiples pour que la communication soit possible et la rencontre authentique. Parce que tu as envoyé ton Esprit dans les profondeurs de chacun, de son être et de son langage. Nous te remercions.
Mais nous n’oublions pas quel a été et quel est le chemin que tu as choisi pour que ton œuvre fasse son travail : Jésus, ton Fils, notre Seigneur. Pour tous ces superbes dons, pour l’Esprit, pour ton Fils et par Lui nous te remercions et nous te chantons.

Que ce soit par l’Esprit, que ce soit par le Fils, tu as pris en compte notre humanité, nous, les hommes, tes enfants. Ton Fils a eu un parcours singulier. Et le Verbe s’est fait chair. Oui, un parmi la multitude bigarré de ce monde bariolé. Oui, avec lui et par lui tu fais avec nous, les hommes du KparK. Tu nous rencontres dans notre pauvreté toujours singulière, dans notre langue et notre langage uniques, de chacun et pour chacun. Tu nous rencontres par ce Fils, Jésus, notre Seigneur dans ce qui est le lot commun à tous, la mort. Mais chacun dans sa mort unique. Car il a connu la mort, une mort dure et impitoyable, la mort sur une croix. Or le fruit de cette mort unique n’est autre que la vie pour tous, dans la chair et le langage de chacun. L’Esprit que tu nous donnes aujourd’hui est chargé de la mise en œuvre, l’agitateur universel qui nous permet de partager cette vie unique et multiforme, la vie du ressuscité. Qu’il fasse de ce pain et de ce vin le signe de la réelle présence de notre Seigneur Jésus, le Vivant.

Fidèles à la recommandation du Seigneur nous célébrons son mémorial. Nous faisons mémoire de sa mort et de sa résurrection et nous proclamons notre espérance dans sa venue.
Rude tâche que celle qui nous attend à nous et à tous ceux qui sont branchés sur le Christ et qui reçoivent le cadeau de l’Esprit. Car tu sais, Dieu notre Père, que le chemin est encore long pour que chacun s’exprime dans sa langue à lui, pour qu’il comprenne l’autre qui s’exprime dans son propre langage, pour que le dialogue soit réel et la communauté des hommes et des disciples du Christ soit plus qu’un effet de sens, davantage qu’une illusion. Oui, que ton esprit continue son œuvre, son travail. Que tous ceux qui partagent le Corps et le Sang du Christ deviennent son Corps, une Eglise d’écoute et multiforme, une Eglise ou la diversité soit reine et la pluralité la norme. Où la liberté soit l’air que respirent tous et la justice et la joie la nourriture quotidienne.

Jésus Asurmendi