Prises de paroles

 

6 MAI - 5ème dimanche de Pâques

Aimez !

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Bienvenue et bonjour au touriste, à l’habitué, et à celui qui passe ici à Saint Merri, un peu par hasard.
“Aimer” un beau thème pour une célébration, mais “amour” est un mot aussi usé et galvaudé. Il se vide de son sens s’il n’est pas ancré dans le concret de nos vies.
Et puis, aimer, est-ce si facile ? est-ce si évident ?

- Dans la première lecture, Claire nous emmènera sur les routes et sur la mer, avec Paul et Barnabé, pour découvrir comment s’ouvrir aux portes de la foi, en communauté,

- dans l’Evangile, Jean nous rappelle quel est le premier commandement donné par Jésus “je vous donne un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimé, vous-aussi, aimez-vous les uns les autres”.
Aimer suppose une attitude, un regard intérieur sur soi et sur les autres, aimer ouvre à la foi.

Je voudrais terminer ce mot d’accueil en vous lisant un court extrait d’un petit bouquin de Christiane SINGER “derniers fragments d’un long voyage” (Albin Michel).
Christiane SINGER savait qu’elle allait mourir et qu’il lui restait six mois à vivre. Elle est morte il y a un mois, le 4 avril, à l’âge de 64 ans :

“Ma dernière aventure. Deux mois d’une vertigineuse et déchirante descente et traversée. Avec surtout le mystère de la souffrance. J’ai encore beaucoup de peine à en parler de sang-froid. Je veux seulement l’évoquer. Parce que c’est cette souffrance qui m’a abrasée, qui m’a rabotée jusqu’à la transparence. Calcinée jusqu’à la dernière cellule. Et c’est peut être grâce à cela que j’ai été jetée pour finir dans l’inconcevable. Il y a eu une nuit surtout où j’ai dérivé dans un espace inconnu. Ce qui est bouleversant, c’est que quand tout est détruit, quand il n’y a plus rien, mais vraiment plus rien, il n’y a pas la mort et le vide comme on le croirait, pas du tout.
Je vous le jure. Quand il n’y a plus rien, il n’y a que l’Amour. Il n’y a plus que l’Amour. Tous les barrages craquent. C’est la noyade, l’immersion. L’Amour n’est pas un sentiment. C’est la substance même de la création.”

Denis Caillet

Actes des Apôtres - Ac 14, 21…27
« Passer par les épreuves »… En cette période électorale, je parle de celle à l'équipe pastorale, ce n'est sûrement pas la meilleure publicité pour faire des émules. En effet nous membres de l'équipe pastorale ne sommes-nous pas comme Paul et Barnabé responsables d'une communauté où tout ne va pas toujours de soi?

Dans ce texte justement, Paul et Barnabé reviennent d'un voyage missionnaire. Partout où ils sont passés ils ont essayé d'annoncer l'Évangile. Des gens ont entendu la bonne nouvelle de Jésus-Christ mais souvent ils ont été chassés avec violence.
Les communautés s'organisent par elle-même et pour que la notre vive, il faut une interaction étroite entre des laïcs, des prêtres et l'Évangile.

Le voyage a été difficile mais pourtant le témoignage final emporte toutes les épreuves : « il a ouvert à tous les portes de la foi».

Claire Baudin

D'après le psaume : H. 144

1. Je t’exalterai, mon Dieu, mon roi
Je bénirai ton nom, toujours, à jamais
Tout danse devant lui
quand l'amour du monde veut bien se souvenir
il est un souffle musicien à son image.

2. Le seigneur est tendresse et pitié
lent à la colère et plein d'amour
Qu’un poème tendre à travers les siècles
qu'une parole jeune monte du temps
pour celui qui sans cesse nous cherche.

3. Le seigneur est vrai en tout ce qu'il dit
Il est fidèle en tout ce qu'il annonce
Peuple des humbles, l'inépuisable paix
te vient de Dieu
comme un printemps
en soûlerie de vent.

Joseph Piérron

Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean - Jn 13, 31…35
Commentaire de Jean-françois Petit

En cette journée d’élection, on pourrait se demander si la politique est aujourd’hui le lieu de réalisation du bien commun ou de concrétisation d’une métaphysique de la charité…

Mais actualité des textes liturgiques oblige, c’est à un questionnement plus fondamental, plus radical, dont finalement tous le reste découle peut-être que nous sommes conduits : qu’est ce que c’est qu’aimer ?

Quand j’étais aux USA l’année dernière, j’avais demandé à l’un de mes collègues quel était l’œuvre de littérature qui intéressait le plus les étudiants américains. Réponse, sans hésitation : Roméo et Juliette. A savoir cet essai sans cesse repris d’apprendre à aimer, dans lequel les étudiants se risquent, dans une société de la surconsommation et de la violence qui parfois se déchaine sans crier gare sur les campus

Sommes-nous si loin de ces apprentissages recommencés d’une tendresse à énoncer par tous les gestes de la vie, tout au long de la vie ? Pas si sur.

Ce qui est certains, c’est que les textes d’aujourd’hui méritent d’être lus à travers à la lumière de Pâques

En effet, c’est la foi en la résurrection qui donne aux premiers disciples le courage de prendre en main leur destin et d’assumer des charges qui, parfois, les dépassent. Pour Paul et Barnabé, qui sont, après tout, des hommes comme nous, vivre de Dieu, c’est accepter de passer parfois par des épreuves, c’est tenter de manifester de la tendresse en affermissant la foi des communautés, prier pour des responsables émergent en leur sein, les accompagner dans cette folle aventure qui s’appelle la vie en Eglise, en restant ouvert aux marges, en étant prêt à se remettre en cause pour accueillir ceux que l’on attendait pas, ceux à qui Dieu se communique déjà par de voies que lui seul connaît.

Mais ce qui me frappe le plus, c’est bien évidemment ce récit de ce repas où Dieu donne en ultime signature cette seule recommandation : ayez de la tendresse les uns pour les autres pour que mon nom soit glorifié.

Rappellez vous le soir du Jeudi Saint ,car le texte de ce jour en est l’écho

Ce soir là, quand le Christ brise le pain verse le vin et se met à genoux pour laver les pieds de ses disciples
Il accomplit des gestes totalement inattendus en montrant que l’amour réside dans le service
Il ouvre sur une réalité nouvelle
Et livre le propre sens de sa vie
En la menant jusqu’au bout de la fidélité
Comme la mèneront bien d’autres après lui
Les moines de Thiberine dont nous fêtions l’anniversaire du martyre il y a quelque temps.

Pour que Dieu soit glorifié
Il se met à genoux pour inverser l’ordre du monde
Il donne sa vie pour que la Bonne Nouvelle
Résonne dans le cœur des hommes
Pour que l’amour du Père puisse battre en chacun de nous


Dans les années 1960, le grand théologien Urs Von Balthasar avait écrit :

« Si dans mon semblable, ce n’est pas Dieu que je rencontre
Si dans l’amour, aucune brise ne vient m’apporter le parfum de l’infini
Si je ne puis aimer mon prochain avec un amour qui provienne de bien plus loin que mon pouvoir fini d’aimer
Si donc, dans notre rencontre, ce qui peut à bon droit porter le très haut nom de l’amour
Ne vient pas de Dieu et ne retourne pas à Dieu
Il ne vaut pas la peine de tenter l’aventure
»

Cette Bonne Nouvelle elle est paradoxale :
Dieu ne fait pas de nous des moutons
Mais il nous ouvre ses bras
Comme un Père ou une Mère
Pour montrer que Dieu ne réside dans aucune cathédrale
Mais qu’il se manifeste dans les gestes les plus ordinaires
Que l’enfant ne grandit que par l’amour qu’il aura reçu et donné
Que la grandeur ne consiste pas à vouloir paraitre, à posséder, à chercher à conquérir
Toujours davantage, y compris politiquement mais à vivre dans la simplicité et l’amitié de Dieu.

Aux questions éternelles : qui puis je aimer ? Comment aimer en vérité ?
Le Christ répond : prenez et mangez ce pain, c’est mon corps
Prenez et buvez ce vin, c’est ma vie

Il dit à ses amis :
Prenez ma façon de vivre
Accueillez ma Bonne Nouvelle
Laissez-la nourrir votre vie
Vivez de mon Evangile
Mangez ma Parole qu’elle soit votre force pour qu’à votre tour vous puissiez aimer

Jean- François Petit

 

Prière universelle

1 . Gérardo : Aimer c'est faire confiance... Malgré ses faiblesses, ses défaillances, croire contre tout espoir en l'Homme, car fait à l'image de Dieu.Aimer c'est regarder l'autre, quel qu'il soit, et même lorsque ses agissements nous dérangent, reconnaître pleinement son droit à l'existence.


2. Denis : Il n’y a pas d’amour sans respect : si je n’ai pour l’autre que de la pitié ou de la condescendance, je n’aime pas. Aimer c’est envisager l’autre dans la richesse de sa différence et dans tout ce que lui aussi peut me donner et m’apporter.


3. Gérardo : Aimer c'est donner, partager:
ce que nous avons,
ce que nous sommes...
Et agir sans cesse pour que, dans notre planète « mondialisée », les différences nous enrichissent tous, au lieu d'en faire des inégalités, des injustices.


4. Denis : Il n’y a pas d’amour sans écoute. Écouter ce n’est pas appliquer de façon administrative et aveugle un décret ou une circulaire réglementaire. Nous sommes tous des immigrés venus d’un passé dont la route est inscrite dans nos gènes.
Écoutons, écoutons-nous, nous-mêmes, en conscience, quand nous participons à la vie publique de notre pays.